Le Handi-Pacte du en Île-de-France a souhaité donner la parole aux acteurs de l'insertion professionnelle et du handicap dans la Fonction publique : employeurs, agents, institutionnels, partenaires... Retrouvez ci-dessous le témoignage de Mélanie Duval, Chargée de mission handicap et process au sein de la Ville de Paris
Peux-tu nous parler de ton parcours et de ce qui t’a conduit à t’investir sur les questions d’égalité, de diversité et de handicap?
J’ai travaillé 2 ans à la Caisse des dépôts en 2011-2012, puis 5 ans dans des associations sur l’insertion des jeunes et le handicap puis depuis 6 ans à la Ville.
Au départ, j’ai plutôt été sensible aux questions de lutte contre les discriminations et l’égalité mais pas forcément orientée handicap. Je voulais œuvrer pour l’égalité de traitement et des chances, une question de justice.
Puis, j’ai une amie qui a eu un très grave accident et qui est devenue lourdement handicapée. Après cela, sans le conscientiser tout de suite, j’ai davantage investigué ce sujet par la suite.
A la Ville de Paris, j’ai d’abord occupé des missions de lutte contre les discriminations et depuis 2 ans et demi, je suis chargée de mission handicap. J’interviens encore sur d’autres sujets tels que la transidentité, ou la non-discrimination mais le gros de mon activité en portage de projet, c’est sur le handicap.
Je suis chargée de mission handicap et procédures , on est 4 chargés de mission au sein de la Mission égalité professionnelle et inclusion qui est rattachée au adjoint de la Ville.
Comment perçois-tu l’évolution de la prise en compte du handicap dans la fonction publique ces dernières années ?
Au sein de la Ville de Paris, l’évolution est notable. Cela tient lieu du changement culturel. On passe d’un accompagnement individuel centré sur le maintien en mode gestion à un accompagnement plus global sur le lieu de travail qui s’intéresse aux relations de travail.
Être recruté est une étape. Il faut répondre aujourd’hui aux agents en situation de handicap qui ressentent le besoin et l’envie de se former, de progresser, en fonction de leurs aspirations.
À la Ville, on est en train d’essayer de passer à une étape supérieure autour des parcours professionnels des agents avec le détachement dans un corps supérieur, la titularisation des apprentis, l’accessibilité des formations, etc.
On va basculer pour certains vers la formation adaptée pour la rendre réellement accessible et améliorer l’accompagnement à la mobilité des agents en situation de handicap.
L’évolution est notable car depuis 2016, l’inclusion est la philosophie. Par exemple, avant la mission handicap recrutait, aujourd’hui, c’est le bureau du recrutement qui intègre la dimension handicap. Pour les aménagements d’épreuves, on les a dotés de matériel également.
Quelles idées ou pratiques t’ont particulièrement marqué ?
L’accompagnement sur le lieu de travail est un sujet qui m’est cher. On a un marché pour cela avec des psychologues du travail qui viennent sur le lieu de travail pour des agents ayant des difficultés psychologiques, mentales, cognitives ou avec d’autres handicap associés. On travaille 2 choses sur le terrain : l’autonomie dans la réalisation des tâches et le relationnel avec l’encadrant et l’équipe au sens large.
Les besoins des agents nous remontent rarement via la médecine préventive donc c’est un peu particulier. Ce sont les remontées terrain de managers sur des comportements inadaptés et des insuffisances professionnelles, ainsi que les référentes handicap qui donnent l’alerte. Les encadrants pensent souvent qu’il n’y a rien à faire quand il y a un handicap psychique et pourtant ce qu’on constate, c’est que parfois en très peu de temps, l’atmosphère change complètement.
J’ai aussi mis en place une supervision des référents handicap qui nous permet de mieux réagir face aux situations complexes. Dans chaque direction, on a un référent handicap qui est notre interlocuteur en central. Cette mission s’est professionnalisée et n’est plus une « casquette » imposée, ce qui génère une dynamique positive. Ils ont une fiche de mission avec un temps dédié, pas toujours suffisant néanmoins. Je les forme, j’anime le réseau et leur propose des formations sur tel ou tel handicap ou des rencontres avec les bureaux de la DRH.
La Ville de Paris développe de nombreuses actions pour concrétiser l’inclusion au travail et notamment la pair aidance. Quels impacts concrets as-tu observé au sein des directions volontaires?
Les impacts sont nombreux. A l’origine, il s’agissait de viser le développement des carrières mais d’autres bénéfices sont apparus : la rupture avec l’isolement, l’intérêt d’avoir un espace de dialogue et de discussion, le recensement de nouveaux besoins d’accompagnement, une meilleure connaissance des besoins, l’identification de nouveaux , un maillage plus fort entre les acteurs et notamment le référent handicap, les pair-aidants. Cela nous permet également de mettre des mots sur une forme de souffrance au travail.
Nous accompagnons aussi les managers avec une formation dédiée d’une journée ou des ateliers d’échanges de pratiques managériales de 0,5 jour avec des cas pratiques. Il y a une formation obligatoire pour les nouveaux managers sur le handicap et la non-discrimination. On a d’ailleurs conditionné une prime d’encadrement de gros services au fait d’avoir suivi la formation lutte contre les discriminations.
Quels défis majeurs identifies-tu pour les années à venir dans la mise en œuvre des politiques inclusives dans la fonction publique ? Quelles seraient selon toi les priorités pour y répondre ?
Je dirai toujours : accompagner dans les carrières, perfectionner le maintien pour pouvoir le dépasser et s’intéresser notamment à la question de la mobilité. J’aimerai développer l’expertise des référents sur le sujet de la mobilité.
Ce serait aussi mieux compenser le handicap des agents pendant leur parcours de reclassement et donc dans le processus de formation, d’accompagnement, les immersions…
Je crois beaucoup aussi au développement de la pair-aidance, y compris en matière de reclassement pour faciliter les transitions.
Et enfin réconcilier QVCT et handicap.
A l’appui de ces défis : densifier les moyens, continuer à convaincre.
Un souhait pour 2025 ?
Travailler sur le handicap psychique et la santé mentale.
Nous nous sommes formés aux PSSM, et créé dans la foulée un groupe de travail avec quelques référentes handicap pour fournir un outil aux encadrants et référents (en cours).
Mon souhait personnel, devenir l’une des formatrices internes Ville de Paris en PSSM.