Se voir refuser l'accès au concours d'entrée d'un Institut de Formation aux Soins Infirmiers en raison de son handicap, c'est ce qui est arrivé à Julie, jeune toulousaine de 24 ans. Une fin de "non-recevoir" non légitime du point de vue juridique, si l'on se réfère notamment à la loi du 11 février 2005. Décryptage
La situation
Julie, étudiante en biologie, décide, suite à un accident de la route l'ayant contrainte à devenir gauchère, de changer d'orientation. Son handicap moteur est non visible de 1erabord, mais il l'empêche de réaliser des manipulations précises des deux mains. Droitière de naissance, elle a appris à devenir gauchère.
Julie souhaite se réorienter vers une carrière d'infirmière et, à cette fin, passer le concours d'un Institut de Formation aux Soins Infirmiers (IFSI). En raison de son handicap, afin de passer le concours, elle demande un tiers temps supplémentaire pour les épreuves. Elle rencontre alors la directrice de l'IFSI où elle souhaite candidater et lui expose sa demande. Cette dernière lui donne la réponse suivante : « Vous ne pourriez pas vous y prendre autrement pour tuer des gens. En tous cas, ce ne sera pas ici ». Elle lui refuse le tiers temps et l'enjoint de ne pas candidater dans son établissement.
La réponse juridique
La directrice de l'IFSI ne peut refuser l'accès à un concours à Julie en raison de son handicap. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées souligne, en effet, le libre accès des travailleurs handicapés à l'emploi et aux concours. Aucun candidat handicapé, ayant fait l'objet d'une orientation en milieu ordinaire de travail ne peut être écarté, en raison de son handicap, d'un concours ou d'un emploi sauf si son handicap a été déclaré médicalement incompatible avec la fonction postulée. La nature de la déficience et les compensations possibles du handicap doivent être prises en compte dans le « recrutement » de la personne. D'autre part, la demande de Julie d'un tiers temps pour passer le concours est tout à fait légitime.
En effet, en vertu du principe énoncé dans son article 35, la loi du 26 janvier 1984 sur la fonction publique territoriale et sa circulaire n°2006-215 du 26 décembre 2006 relative à l'organisation des examens et concours de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur pour les candidats présentant un handicap, prévoient des dérogations aux règles normales de déroulement des concours et des examens afin, notamment, d'adapter la durée et le fractionnement des épreuves aux moyens physiques des candidats ou de leur apporter les aides humaines et techniques nécessaires précisées par eux au moment de leur inscription : installation dans une salle spéciale, temps de composition majoré d'un tiers, utilisation d'un ordinateur, assistance d'un secrétariat, temps de repos suffisant entre les épreuves, sujets rédigés en braille… Les candidats bénéficiaires de l'obligation d'emploi doivent d'abord prendre contact avec le médecin agréé.
Plus d'informations sur www.legifrance.gouv.fr
Un épilogue heureux
Julie a finalement passé le concours d'un autre institut de formation aux soins infirmiers, celui du Centre de Rééducation et d'Insertion Professionnelle (CRIP ) de Castelnau de Lez dans l'Hérault qui accueille des personnes reconnues en qualité de travailleurs handicapés, qu'elle a brillamment réussi. Elle poursuit aujourd'hui, sans encombre, son cursus d'élève infirmière, mais doit toujours faire face au regard des autres sur son handicap non visible. Comme elle le souligne, « dans le milieu des soignants, le mot handicap fait encore plus peur qu'ailleurs ». Ses stages au sein de centres hospitaliers ou de cliniques lui permettent de faire évoluer le regard que les personnels soignants portent sur le handicap dans le travail.