Atteindre l'obligation d'emploi, fixée par la loi, de 6% de travailleurs handicapés impose, pour les employeurs publics, de mieux identifier les personnels pouvant bénéficier d' une RQTH (reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé) et accompagner ces derniers dans le processus de demande. Il est important d'expliquer les contreparties qui peuvent découler d'une RQTH pour diminuer les réticences légitimes, des agents. Ce travail se fait sur le long terme car il demande que la confiance s'instaure. La preuve par l'exemple avec le CHU de Rouen.
Au sein du CHU de Rouen, une cellule Handicap, composée de la responsable du recrutement, de la DRH adjointe, d'une assistante sociale et d'une attachée administrative, a été constituée afin de suivre la mise en place de la convention avec le FIPHFP en juin 2010 et de développer la politique Handicap de l'établissement.
Au-delà des 2 axes principaux d'actions (recrutement / maintien dans l'emploi), le CHU a souhaité augmenter le pourcentage de personnes reconnues travailleurs handicapés. En effet, si actuellement entre 320 à 350 personnes bénéficient d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH ), un travail d'incitation à la demande de cette reconnaissance peut être réalisé. En effet, la RQTH permet aux agents de bénéficier d'aides pour leur maintien dans l'emploi (adaptation de poste de travail, formations…). Isabelle Turquier, assistante sociale au CHU de Rouen, fait le constat suivant : « Dans le secteur hospitalier, la question du maintien dans l'emploi, voire du reclassement, des aides-soignantes se pose vers 45 à 55 ans. Du fait de la dimension physique de leur poste, elles rencontrent des difficultés à exercer, au jour le jour, leur métier. Et, dans le même temps, il leur est difficile de demander une RQTH qui révèle, pour elles, la limite de leur capacité au travail. Il faut les comprendre ».
Connaître, personnellement, les agents et instaurer une relation de confiance
Les assistantes sociales, rattachées à la Direction des Ressources Humaines, sont à l'origine des dossiers de RQTH . Comme l'indique Isabelle Turquier, « dans le cadre du suivi des agents en congé longue maladie, nous proposons systématiquement, au bout de 90 jours d'arrêt, un rendez-vous (au CHU ou à domicile pour les personnes ne pouvant se déplacer) afin de faire le point sur la situation de l'agent. Les retours sont bons : entre 90 et 95% de réponses positives. Dans le cadre de cette rencontre, s'il y a besoin d'un aménagement de poste spécifique pour le retour à l'emploi, nous commençons à aborder la question de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé ».
La RQTH , une démarche positive pour l'agent et l'employeur
« L'important, c'est d'être clair et honnête. Nous expliquons la démarche : l'intérêt pour la personne de demander une RQTH : en matière d'aménagement de poste, d'accompagnement, de formation, par exemple, et l'intérêt pour l'employeur d'atteindre le taux de 6% d'emploi de travailleurs en situation de handicap. C'est une démarche donnant-donnant. Nous leur disons clairement : il y a un bénéfice pour vous à obtenir cette reconnaissance et l'établissement a tout intérêt à vous voir qualifié pour satisfaire son obligation ». Une méthode qui semble porter ses fruits, pour le CHU de Rouen, car peu d'agents refusent alors de faire la démarche de reconnaissance. Mais le processus peut s'avérer long, les agents mettant parfois du temps à constituer le dossier et fournir ensuite les justificatifs au CHU . Un accompagnement personnalisé, réalisé en lien avec la médecine du travail, tout au long des démarches, est nécessaire et bienvenu. C'est par la bonne connaissance des agents, de leur situation personnelle et une relation de proximité que s'instaure le climat de confiance permettant de les accompagner au mieux.
Aujourd'hui, le CHU de Rouen bénéficie du travail mené depuis plus d'un an et demi. Isabelle Turquier s'étonne même que « le bouche à oreille commence à beaucoup jouer. Je reçois des agents qui viennent me voir pour renouveler leur RQTH et qui me disent, à cette occasion, qu'ils ont un ou une collègue qui doit également effectuer son renouvellement ou qui pourrait prétendre à une RQTH . De plus en plus de personnels viennent également me voir de manière spontanée ». Un joli succès.
Parallèlement, une cartographie des postes aménagés a été réalisée directement auprès des cadres de « pôles » volontaires. Cette démarche a permis d'identifier les actions réalisées dans les services en matière de maintien dans l'emploi, avant que le FIPHFP n'existe, et de découvrir des agents maintenus sur leur poste depuis plusieurs années, sans qu'ils soient reconnus bénéficiaires de l'obligation d'emploi.
Afin d'accompagner ces actions et de sensibiliser les personnels, des actions de communication interne sont prévues, notamment dans le cadre de la Semaine pour l'Emploi des Personnes Handicapées 2011 : sensibilisation de l'encadrement et des internes en médecine accueillis au sein du CHU , mise en situation via des scénettes de théâtre…
Un travail spécifique a également été mené en direction de la médecine du travail.
Un travail de mise en confiance sur le long terme
L'exemple du CHU de Rouen montre qu'il ne sert à rien de faire « la chasse à la RQTH ». Un recensement « agressif » des personnes relevant de cette obligation d'emploi, via la médecine du travail ou l'encadrement sera contreproductif. Le travail à mener doit passer par des actions de sensibilisation des personnels, de l'encadrement et de la médecine du travail. Un accompagnement individualisé doit être proposé aux employés, en fonction de leur situation, L'employeur public doit être honnête et expliquer l'intérêt de la RQTH pour l'agent, mais aussi pour lui-même.