Votées par le FIPHFP en septembre dernier, les mesures en faveur de l'accessibilité intègrent un volet dédié au numérique et aux technologies de l'information et de la communication (TIC ). Une enveloppe de 25 M€ est ainsi consacrée à ces technologies présentes dans tous les secteurs professionnels.
Pour rendre ces TIC accessibles aux personnes handicapées, des laboratoires de recherche, comme l'IRIT , l'Institut de Recherche en Informatique de Toulouse rattaché au CNRS , travaillent sur les interactions homme / machine et de nouvelles fonctionnalités. Rencontre avec Nadine Vigouroux, chercheure à l'IRIT.
A l'occasion de la conférence Accessibilité du FIPHFP lors du Salon des Maires, en novembre 2011, Jean-François de Caffarelli, directeur du Fonds, revenait sur l'accessibilité numérique et les TIC : « Nous utilisons dans la fonction publique, comme maintenant dans tous les secteurs de l'économie, beaucoup d'outils, des progiciels, des plateformes internet et extranet, etc. Ces outils n'ont pas toujours été conçus en fonction de leur mise en accessibilité, notamment pour les personnes non-voyantes ou malvoyantes. Si l'on ne fait rien, nous privons un certain nombre de personnes de l'utilisation de leur outil de travail. Nous allons donc travailler avec les centres de recherche sur les outils numériques et leur accessibilité, pour développer des méthodes et des aides concrètes ».
Des travaux sur l'accessibilité des TIC existent depuis plusieurs années au sein de l'IRIT . Nadine Vigouroux et son laboratoire Ellipses , travaillent sur les interactions homme / machine dans les situations de handicap. Il s'agit de concevoir, de développer et d'évaluer des « systèmes de suppléance » pour les personnes handicapées. Le laboratoire s'intéresse à des typologies de handicap très différentes (handicap visuel, troubles de la parole, troubles cognitifs, handicap moteur) et mène plusieurs programmes de recherche.
Une des particularités de l'équipe Ellipses est d'intégrer en son sein plusieurs chercheurs en situation de handicap : un ingénieur et un assistant ingénieur non- voyant, un ingénieur atteint de myopathie et un ingénieur en situation de handicap moteur. Ils participent aux recherches à la fois en tant qu'ingénieurs et utilisateurs : « Ils sont complètement immergés dans l'environnement des TIC et sont les premiers utilisateurs des systèmes développés. Ils apportent à la fois leur expertise technique, jouent un rôle de médiateur avec les réseaux associatifs ou institutionnels liés au handicap et, par leur expérience d'usage des technologies, ils sont force de proposition pour l'expression des besoins », souligne Nadine Vigouroux.
Actuellement, deux programmes de recherche liés aux personnes en situation de handicap sont en cours. Le premier s'intéresse à l'accessibilité augmentée des documents pour les déficients visuels. Les systèmes qui existent actuellement, fonctionnent sur les seuls dispositifs vocaux de lecture des textes. Ces logiciels ne rendent pas compte de la mise en page graphique et de la disposition spatiale des textes (gras, soulignement, mise en exergue, schémas, hiérarchie de l'information). La personne malvoyante perd alors une partie de l'information au détriment de la compréhension et de la mémorisation. Les recherches de l'IRIT portent sur la création d'interfaces multimodales, associant deux sens et permettant de prendre en compte les différentes dimensions de l'information. Avec les TIC actuelles, il est désormais possible d'associer des systèmes liés au toucher (dispositifs haptiques*) et vocaux pour enrichir une information jusqu'ici linéaire. Ce projet de recherche a fait l'objet d'une thèse. L'IRIT est actuellement à la recherche de financement pour le poursuivre.
Le second axe de recherche sur lequel travaille Nadine Vigouroux et son laboratoire concerne un projet d'aide à la communication pour les personnes en situation de handicap moteur. Ce projet, nommé Paliacom, vise à développer des interfaces de communication facilement utilisables, comme les claviers virtuels.
L'objectif est de permettre à la personne handicapée motrice d'utiliser l'outil informatique sur la durée, sans trop se fatiguer. Concrètement, le laboratoire mène une phase d'observation des besoins de la personne et fait des recommandations d'agencement spatial ou d'adaptation de caractères pour faire évoluer les claviers virtuels existants et favoriser ainsi l'accès aux postes de travail informatisés.
Autre application possible, sur laquelle travaille l'IRIT : le principe de saisie facilitée des textes. « Lorsque la personne commence à taper un mot, on lui facilite la saisie, indique Nadine Vigouroux. Le système va insérer une partie du mot, voire le mot entier de manière intuitive ». Une expérimentation est d'ailleurs en cours au sein d'un Institut Médico-Educatif de la région Midi-Pyrénées. Au-delà de l'accès à des postes d'ordinateur, les programmes de recherche impactent l'accès aux fonctionnalités de la vie sociale et professionnelle, des éléments centraux pour l'intégration des personnes handicapées.
Les applications étudiées par l'IRIT ne sont pas aujourd'hui disponibles sur le marché. Toutefois, un certain nombre de matériels ou de logiciels accessibles existent pour aider les personnes en situation de handicap dans leur travail.